Manifeste de l'hypermonde (suite)

Denis Marchand: L'Hypermonde pour aujourd'hui ?

L'homme est un animal qui se pose toujours des questions. Il se tourne souvent sur le passé et quelquefois fait des projections dans l'avenir.

Je parle ici de l'homme qui a une tête pour s'en servir, pas de l'écervelé. Je parle de ceux qui s'intéressent à l'homme, pas de ceux qui réfléchissent à leur repas du soir...

Toutefois l'homme n'est pas un être standardisé (ou tout du moins pas encore: il peut y arriver d'ici quelques siècles). Chacun se situe à un point d'une trajectoire. Ce qui l'intéresse, c'est d'évoluer sur cette trajectoire, suivant son désir, sa visibilité de l'avenir. Le séminariste se voit-il évêque, pape? Le cambiste va-t-il devenir trésorier d'une société internationale? Le vendeur de journaux être élu prix Goncourt ? Le chef du personnel se transformer en père chartreux ?...

Comment "voir l'avenir" ? C'est un rêve de l'homme depuis toujours. Il fait d'ailleurs souvent appel à des "voyants". Il y croit d'autant plus qu'il n'a pas d'éléments objectifs à sa disposition pour bâtir de futur tant désiré. C'est donc le cas pour les questions les plus difficiles et souvent les plus importantes! Il n'y a qu'à connaître le nombre de grands politiciens qui consultent...

Mais alors, si on peut être si sceptique sur l'apport de vérité donné par les mages, que pouvons-nous proposer d'autre?

En fait, depuis que l'humanité existe, elle a su gérer des informations: voir les grottes rupestres, les pierres alignées ppuis gravées, les temples incas, égyptiens, orientaux, les papyrus, les missi dominici, les incunables, l'imprimerie, le télégraphe de Chappe, la poste, le téléphone, la radio, la sténographie, la mécanographie, le télex, la télévision, l'informatique, la bureautique, les télécommunications... à titre d'exemples!

Le processus s'accélère, car nous savons utiliser plus rapidement nos inventions pour innover. Nous développons de nouveaux outils, de plus en plus puissants, qui forcent les développeurs d'applicatifs à faire preuve d'imagination, afin d'être les premiers à proposer un nouveau système d'information encore plus performant.

Arrêtons-nous une seconde entre le passé et le futur.

Où en sommes-nous?

Très difficile de répondre.

- quelques quelques uns ot des micro-ordinateurs, dont une partie sont plus ou moins connectés à des réseaux

- une infirme minorité pratique le multimédia ou le travail de type collectique (travail communautaire avec des stations interconnectées).

Dans tous les cas, l'emploi du stylo et du papier est pratiqué. Le poste fonctionne bien; la photocopieuse aussi. Quant au téléphone, il arrive encore que certaines lignes soient saturées!

Et l'hypermonde? Serait-ce le résultat d'un groupuscule qui procède régulièrement à des élucubrations de spécialistes en mal de progrès?

Non, c'est l'expression d'hommes d'expérience qui ont su regarder, examiner comment le passé était devenu présent. Qui savent extrapoler comment les moyens actuels pourront, en se développant, rendre le bon service aux hommes de demain.

En effet, qui est conscient que c'est un prodige de pouvoir écouter l'orchestre philarmonique de Berlin en plein désert ou au milieu du Pacifique. Pense-t-on au seigneur qui payait le troubadour de passage, il y a seulement cinq siècles, pour qu'il lui chante une comptine? De même, la télévision est devenue portative et les satellites permettent, avec de petites antennes, de capter une émission sans aucon "raccord" physique...

On ne doute donc plus guère des possibilités que la technique peut nous offrir (et on a tort car il y a toujours des limites, par exemple, un écran plat couleur de bonne résolution, bonne diagonale, à un prix raisonnable).

La question qu'il faut se poser est : a-t-on encore besoin de progresser? Il faut d'autant plus se la poser que certains n'hésitent pas aujourd'hui à jeter notre progrès (particulièrement informatique) aux gémonies! La crise économique ou la désorganisation financière internationale, étant passés par là. Là encore, il est nécessaire de se placer en trajectoire et non pas de faire un examen ponctuel: le progrès technologique a toujours apporté bien-être et richesse à l'homme. Pensons au niveau de vie et au temps de travail, il y a 20 ans, 50 ans, 100 ans!

Non, la base de notre humanité réside plutôt dans la concentration urbaine. Les agriculteurs ont d'abord dû abandonner leurs champs pour aller travailler à la ville. Puis les ouvriers se sont petit à petit transformés en "cols blancs" et doivent venir, dans les bureaux des centres régionaux: les routes sont engorgées, les trains bondés. Les deux heures de transport par jour sont fréquents: quel gaspillage d'énergie!

L'hypermonde est plus que nécessaire: il est indispensable.

Reste que son assimilation sera, comme toujours, longue, avec des à-coups, des erreurs d'introduction, des rejets ponctuels et des enthousiasmes irréalistes. Les usagers ne sont jamais demandeurs mais "à la remorque" de quelques novatuers. Les directins d'entreprise sont rarement téméraires et il faudra la conviction d'hommes de l'art pour assurer son introduction.

Alors, chez soi, on triera son courrier électronique (écrit ou oral), on rejettera les "prospectus électroniques" et transmettra les informations nécessaires à ses collaborateurs. On pratiquera la télé-réunion d'organisation de la journée, préparera la tournée de visio-contacts avec les prospects et clients... On fera aussi ses courses en télé-achat tandis que les enfants suivront certains cours en télé-enseignement. Les moyens de transport, route et rail, seront transformés en câbles et autre transmissions hertziennes.

Mais alors, n'y a-t-il pas danger pour l'animal-homme? Déjà la vie moderne l'a affublé du "mal de dos" et de crises cardiaques dues aux vibrations, au stress et au manque d'exercices physiques.

C'est là que devra intervenir la sagesse et que la crise actuelle peut nous aider. On peut considérer que, pour beaucoup, notre niveau de vie matérielle est devenu suffisant. Par contre, nous vivons mal. De plus, le taux d'activité est inférieur au potentiel total du travail. Bon sang, mais c'est bien sûr! Il faut partager l'activité totale entre tous les travailleurs. Il fau développer l'hypermonde qui accroîtra notre productivité et nous permettra d'être concurrentiel. CQFD.

Mais, par ailleurs, il y a danger. L'homme peut se perdre dans l'hypermonde. aussi bien physiquement que psychiquement.

Physiquement, il pourra "tout faire" de son fauteur (pourquoi pas de son lit, pendant qu'on y est). Il risque donc l'anémie, l'atrophie.

Psychologiquemnet, il pourra "rentrer" dans son écran, perdre la réalité de son entourage, du monde. Flotter dans l'imaginaire. Voir des éléphants roses. Entrer, comme en lévitation, dans une sorte d'hypnose, dont il pourrait avoir du mal à sortir.

En fait, là aussi, la réponse est simple. De bon sens. On a vu que le temps de travail était abrégé. Le temps libre est donc augmenté. Il y a place pour des activités différentes: exercices sportifs pour l'entretien du corps, mais aussi culturels pour celui de l'esprit, de la connaissance. On pourra voir ainsi progresser la vie sociale, associative. On gagnera en qualité de vie individuelle et collective.

L'hypermonde, un paradis? Non, le progrès. Car l'homme cherche tujours l'idéal. Il ne le trouvera pas sur terre. De plus, il a besoin d'évoluer, de progresser, pas d'être égalitaire. Chacun est sur sa trajectoire. Mais, à un moment ou à un autre, on est informé d'une trajectoire supérieure, qui fait envie.

A la limité, on peut penser que cette évolution technologique renforcera l'inégalité? Une ségrégation pourrati se faire en fonction des capacités intellectuelles des hommes, comme elle se faisait dans le temps en fonctdion de leurs capacités physiques.

Alors, comment entrer dans l'hypermonde? Il faut commencer par s'armer de curiosité et de patience. En effet, nous sommes l'aube de ce monde nouveau. Il existe des embryons technologiques, comme lorsque le traitement de texte débutait, vers 1970. Mais, de même, les premiers utilisateurs serotn les découvreurs qui gagneront le plus.

N'hésitons donc pas à utiliser les outils multimédia et collectifs. Informons-nous. Adaptons notre organisatino pour en profiter. Impliquons notre entourage. Testons la première applicatino... N'oublions pas qu'un grand homme a les pieds sur terre et la tête au ciel!

Chapitre précédent. Chapitre suivant. Retour au sommaire