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TEILHARD DE CHARDIN

Noosphère et hypermonde Pierre Berger, 3 mai 1994

Un phénomène... d'optimisme



A l'Entropie quelque chose échappe donc dans le Cosmos - et y échappe de plus en plus. Pendant d'immenses périodes, au cours de l'Evolution, le radial, obscurément agité par l'action du Premier moteur en avant, n'a pu arriver qu'en groupements diffus... Franchir la surface critique d'hominisation, c'est en fait, pour la conscience, passer du divergent au convergent... En deçà de cette ligne critique, "équatoriale", la retombée dans le multiple. Au delà, la chute dans l'unification croissante, irréversible. (PH 302)

Si le Progrès est un mythe, c'est-à-dire si devant le travail nous pouvons dire : "A quoi bon ?", notre effort retombe, entraînant ans sa chute, puisque nous la sommes, toute l'Evolution. (PH 257)

Une impression à surmonter, le Découragement. (PH 282)

... l'Univers sort de l'ombre. Il précise ses traits. Il se valorise. Il s'échauffe. Et finalement il s'illumine par le dedans. (AH119)

Une épistémologie fusionnelle



Pour être correctement compris, le livre que je présente ici demande à être lu, non pas comme un ouvrage de métaphysique, encore moins comme une sorte d'essai théologique, mais uniquement et exclusivement comme un mémoire scientifique. (PH 21)

... une interprétation, même positiviste, de l'Univers doit, pour être satisfaisante, couvrir le dedans, aussi bien que le dehors des choses, ... (PH 30)

Relier entre elles d'une manière cohérente les deux Energies du corps et de l'âme. (PH 59)

Dans le social se poursuivent en ligne droite la Chimie et la Biologie (AH167)

Dans le social se poursuivent en ligne droite la Chimie et la Biologie (AH167)

... une certaine masse de conscience élémentaire se trouve emprisonnée, aux origines, dans la Matière terrestre (PH 71)

... une perspective cohérente, où convergent et culminent, dans l'avenir, les deux courants les plus fondamentaux et les plus puissants de la conscience humaine: celui de l'intelligence et celui de l'action, celui de la science et celui de la religion. (AH vers 160)

(Tout de même pas réductionniste)



... rejeter l'idée trop simple de "changement de forme" (PH ou de transformation directe), - et par suite de trouver jamais un "équivalent mécanique" de la Volonté ou de la Pensée (PH 61)

(Mais qui prête le flanc à la critique de l'Eglise comme des savants)

CHERCHEUR HARDI, FILS DOCILE(Le Figaro, 3/7/62) Le retentissement donné par les agences de presse à l'avertissement du Saint-Office concernant les oeuvres du Père Teilhard de Chardin soulève chez plus d'un une émotion qui risque de dépasser le dimensions de l'événement. Le Saint-Office exhorte les évêques et tous les supérieurs d'instituts religieux, ainsi que les supérieurs de séminaires et recteurs d'université, "à prémunir les esprits, surtout des jeunes, contre les dangers que comportent les oeuvres du père Teilhard de Chardin et de ses disciples". En effet, précise le document, "en matière de philosophie et de théologie, il est assez évident que ces oeuvre fourmillent d'ambiguïtés, voire d'erreurs graves, de nature à heurter la doctrine catholique". ... les vues généreuses et hardies d'un savant doublé d'un prophète et d'un mystique. ... il n'avait l'âme ni d'un révolté, ni d'un hérétique. Il n'aspirait qu'à se sentir plus sûrement dans l'esprit de l'Eglise. (P. Michel Riquet s.j.)

... Jean Rostand mettait en doute les compétences biologistes du P. Teilhard et rappelait que la pensée teilhardienne avait eu des précurseurs... (Joseph Folliet, La Croix de Paris 21/8/65)

L'évolutionnisme poussé aux limites A toutes les époques, l'Homme a cru qu'il se trouvait à un "tournant de l'Histoire" (PH 236)

Aujourd'hui, la connaissance positive des choses s'identifie avec leur développement. (PH 41)... la matière se découvre à nous en état de genèse (PH 44)

... la Vie est, et ne peut être qu'une grandeur de nature ou dimensions évolutives. (PH 151)

...la Pensée sur Terre n'a pas encore atteint le terme de son évolution (AH118)

Mais l'évolution a un sens



La Science, dans ses ascensions, et même... l'Humanité dans sa marche - piétinent en ce moment sur place, parce que les esprits hésitent à reconnaître qu'il y a une orientation précise et un axe privilégié de l'évolution. Débilitées par ce doute fondamental, les recherches se dispersent et les volontés ne se décident pas à construire la Terre. (PH 154)

... si les choses tiennent et se tiennent, ce n'est qu'à force de complexité, par en haut. (PH 37) La dialectique teilhardienne Oui, de la cellule à l'animal pensant, comme de l'atome à la cellule, un même processus (échauffement ou concentration psychique) se poursuit sans interruption, toujours dans le même sens. Mais, en vertu même de cette permanence dans l'opération, il est fatal, du point de vue de la Physique, que certaines sautes transforment brutalement le sujet soumis l'opération. (PH 186). ... Discontinuité de continuité. Telle se définit et se présente à nous, dans la théorie de son mécanisme, juste comme l'apparition première de la Vie, la naissance de la Pensée. (PH 187) Aucune grandeur au monde... ne saurait croître sans aboutir à quelque point critique, à quelque changement d'état. (PH 165) ... une énergie tangentielle, qui rend l'élément solidaire de tous les éléments du même ordre... et une énergie radiale, qui l'attire dans la direction d'un état toujours plus complexe et centré, vers l'avant (PH 62) ... la nécessité et le fait d'une cosmique embryogenèse ne supprime en rien, pou celui-ci (un être nouveau) la réalité d'une historique naissance (PH 78) ... l'originalité de la cellule paraît être d'avoir trouvé une méthode nouvelle d'englober unitairement une plus grande masse de Matière (PH 88) La Vie est née et se propage sur terre comme une pulsation solitaire. C'est de cette onde unique qu'il s'agit maintenant de suivre, jusqu'à l'Homme, et si possible jusqu'au delà de l'Homme, la propagation (PH 107) Considérée dans son ensemble, la Vie se segmente en avançant. Spontanément elle se rompt, par expansion, en larges unités naturelles hiérarchisées. Elle se ramifie.(PH 120) Le pas de la réflexion Après des milliers d'années qu'elle monte sous l'horizon, en un point strictement localisé, une flamme jaillit. - La pensée est là! (PH 175) Si l'on veut trancher cette question (PH aussi nécessaire à décider pour l'Ethique de la Vie que pour la connaissance pure...) de la "supériorité" de l'Homme sur les Animaux, je ne vois qu'un seul moyen: écarter résolument, dans le faisceau des comportements humains, toutes les manifestations secondaires et équivoques de l'activité interne, et se placer en face du phénomène central de la Réflexion. (PH 181) Le pas de la réflexion.. b) Mécanisme théorique (PH 183) ... la température psychique s'élevait dans le monde cellulaire... A l'Anthropoïde porté "mentalement" à 100 degrés, quelques calories ont donc été ajoutées. (PH 185) l'intelligence a pu (ou même dû) être aussi peu perceptible extérieurement, à ses origines phylétiques, qu'elle l'est encore, pour nos yeux, en chaque nouveau-né, au stage ontogénique. (PH 189). Dans le monde, l'Homme est entré sans bruit... (PH 203) La Terre fait "peau neuve". Mieux encore, elle trouve son âme. (PH 201) Parvenus à la cime, nous pouvons maintenant nous retourner, et chercher, par un regard jeté en arrière, à embrasser, d'un coup d'oeil descendant, l'agencement total. En vérité, la contre-épreuve est décisive, et l'harmonie parfaite. De tout autre point de vue, quelque chose jure, quelque chose "cloche" : car la pensée humaine ne trouve pas de place naturelle, - une place génétique - , dans le paysage. Ici, de haut en bas, à partir de notre âme inclusivement, les lignes se continuent ou se reculent, sans torsion ni brisure. De haut en bas, une triple unité se poursuit et se développe: unité de structure, unité de mécanisme, unité de mouvement. (PH 245) Une éthique de l'évolution même En vérité, le Monde est une trop grande affaire. Il a depuis les origines, pour nous enfanter, miraculeusement joué avec trop d'improbables, pour que nous risquions quoi que ce soit à nous engager plus loin, jusqu'au bout, à sa suite. S'il a entreprise l'oeuvre, c'est qu'il peut l'achever, suivant les mêmes méthodes, et avec la même infaillibilité, qu'il l'a commencée. Au fond la meilleure garantie qu'une chose doive arriver, c'est qu'elle nous apparaisse vitalement nécessaire. Nous venons de constater que la Vie, portée à son degré pensant, ne peut continuer sans exiger, par structure, de monter toujours plus haut. C'en est assez pour être assurés des deux points dont notre action a immédiatement besoin: Le premier, c'est qu'il y a pour nous, dans l'avenir, sous quelque forme, au moins collective, non seulement survivance, mais survie. Et le second, c'est que, pour imaginer, découvrir et atteindre cette forme supérieure d'existence, nous n'avons qu'à penser et à marcher, toujours plus outre, dans les directions où prennent leur maximum de cohérence les lignes passées de l'Evolution. (PH 259) Ce qui, finalement, tend à séparer en deux camps les hommes d'aujourd'hui ce n'est pas la classe, mais un esprit, - l'esprit de mouvement. Ici ceux qui voient la Monde à construire comme une demeure inconfortable; et là ceux qui ne peuvent l'imaginer que comme une machine à progrès, - ou mieux, comme un organisme en progrès. Ici l' "esprit bourgeois" dans son essence; et là les vrais "ouvriers de la Terre", ceux dont on peut aisément prédire que - sans violence ni haine, mais par pur effet de dominance biologique - ils seront demain de genre humain. Ici le déchet, - là les agents et les éléments de la Planétisation. (Pékin, 25/12/45). (AH175) Le grand ennemi, "l'ennemi n° 1" du monde moderne, c'est l'ennui. (AH184) Monter ensemble, la socialisation ... son inclination profonde vers la Socialisation (PH 125) ... une totalisation intérieure du Monde sur lui-même,- dans l'édification unanime d'un Esprit de la Terre. (PH 281) Méga-synthèse... Une collectivité harmonisée des consciences, équivalente à une sorte de super-conscience. ... La pluralité des réflexions individuelles se groupant et se renforçant dans l'acte d'une seule Réflexion unanime". (PH 278-279) L'amour sous toutes ses nuances, n'est rien autre chose, ni rien moins, que la trace plus ou moins directe marquée au coeur de l'élément par la Convergence psychique sur soi-même de l'Univers. (PH 294) La machine libère l'homme (La formation de la "noosphère" (AH199). in Revue des questions scientifiques, Louvain, janvier 1947. ) On l'a observé depuis longtemps: ce qui, zoologiquement, a permis à l'homme d'émerger sur la Terre, et d'y triompher, c'est d'avoir éviter de sa mécaniser dans son corps, anatomiquement. Chez tous les autre animaux, la tendance apparaît, irrésistible et manifeste, du vivant à transformer en outils ses membres, ses dents ou même sa face. Pattes devenues pinces, pattes coureuses armées de sabots, pattes ou museau fouisseurs, pattes ailées, becs, défenses, etc. ; autant d'adaptations donnant naissance à autant de phyla se terminant chacun à une impasse spécialisée. sur cette pente dangereuse, conduisant à l'emprisonnement organique, l'Homme, lui, s'est arrêté à temps. Parvenu au stade tétrapode, il a su s'y maintenir sans réduire davantage les rayons de ses membres. Et possesseur de la main en même temps que de l'intelligence, - capable, par suite, de fabriquer et de multiplier indéfiniment, sans s'y engager somatiquement, des instruments "artificiels", - il est parvenu, tout en accroissant et variant sans limite son efficience mécanique, à conserver intactes en lui les libertés et les forces de cérébralisation. Cette signification et cette fonction biologiques de l'outil enfin détaché du membre, il y a longtemps, disais-je, qu'on les a reconnues. Et il y a longtemps aussi que, poursuivant la même ligne de pensée, on s'est avisé que l'outil, séparé de l'Homme, développait pour son propre compte une sorte de vitalité autonome. Machins passives donnant naissance à la machine active, elle-même suivie par la machine automatique. Voilà pour les grandes classes. Et, à l'intérieur de chaque classe, quelle arborescence de branches et de rameaux, chacun doué d'une sorte de potentiel évolutif, logiquement et biologiquement irrésistible! Pensez seulement à l'automobile ou à l'avion... Tout ceci, on l'a déjà aperçu, et souvent dit. Mais ce qui n'a pas encore été suffisamment mis en lumière (et cependant qui explique tout) c'est combien ce processus de mécanisation était affaire collective, et comment il aboutit à construire, en périphérie de l'Humanité, un organisme de nature et d'ampleur collectives. (AH211) ... de plus en plus, chaque machine ne s'engendre plus qu'en fonction de toutes les autres machines de la terre; et, de plus en plus aussi, toutes les machines de la terre, prises ensemble, tendent à former une seule grande Machine organisée. Obéissant inévitablement à l'inflexion des phyla zoologiques, voici que les phyla mécaniques se reploient à leur tour chez l'Homme, accélérant et multipliant ainsi leur progrès, jusqu'à former un seul complexe géant, circumplanétaire. Et le support, le noyau inventif de cet immense appareil, quel est-il, sinon précisément le foyer pensant de la Noosphère? (AH212-213) Grâce à la machine... l'Homme est parvenu à éviter... que fût absorbé le meilleur de lui-même... dans le physiologique et le fonctionnel. Mais à côté et en plus de ce rôle préservateur, comment ne pas voir le rôle constructeur joué par elle dans l'éclosion d'une conscience vraiment collective? ... la Machine constructrice... aidant à se nouer sur soi, à se concentrer sous forme d'un organisme toujours plus pénétrant les éléments réfléchis de la Terre. (AH214) Et ici, naturellement, je songe en premier lieu à l'extraordinaire réseau de communications radiophoniques et télévisuelles qui, anticipant peut-être une syntonisation directe des cerveaux au moyen des forces encore mystérieuses de la télépathie, nous relient déjà tous, actuellement, dans une sorte de co-conscience "éthérée". (AH214) Mais je songe aussi à la montée insidieuse de ces étonnantes machines à calcul qui, grâce à des signaux combinés à raison de plusieurs centaines de mille par seconde, non seulement viennent soulager notre cerveau d'un travail fastidieux et épuisant, mais encore, parce qu'elles augmentent en nous le facteur essentiel (AHet trop peu observé) de la "vitesse de pensée", sont en train de préparer une révolution dans le domaine de la Recherche (AH214). ... une certaine philosophie en sourit avec dédain. "Machines commerciales, entend-on répéter, machines de gens pressés, pour gagner du temps et de l'argent". O aveugles... comment n'apercevez-vous pas que ces instruments matériels... ne sont finalement pas autre chose que les linéaments d'une sorte particulière de super-cerveau... (AH215) Au delà de la crise, le point Omega ... le phénomène du chômage. Par suite du développement extraordinaire pris par la Machine, un nombre rapidement croissant de bras, des dizaines de millions, se trouvent aujourd'hui sans emploi. Et les experts regardent avec stupeur cet appareil économique, leur oeuvre, qui, au lieu d'absorber la puissance mécanique humaine qu'ils lui présentent, en rejette toujours un peu plus, comme si le dispositif monté par eux tournait en sens inverse de leurs prévisions. ... pourquoi... ne regardent- ils pas un peu du côté de la biologie? Est-ce que... la vie a jamais procédé autrement qu'en dégageant du psychique à la faveur du mécanique? ... Semblable à un astre qui s'échauffe en se contractant, - ainsi, et doublement la Noosphère : en intensité d'abord, dans la mesure où, par rapprochement et exaltation continuelle des foyers pensants répandus à sa surface, monte en elle la tension, la température psychique; en quantité aussi, dans la mesure où un plus grand nombre d'individus... se trouvent en position de laisser jouer leur cerveau. De ce chef, essayer de refouler le chômage dans la Machine ne serait qu'un effort contre nature, une absurdité biologique. La Noosphère ne peut fonctionner qu'en libérant toujours plus, et à un potentiel plus élevé, de l'énergie spirituelle. (AH218-219). Mais... comment canaliser et utiliser le flot montant, mais encore brut et informe, de conscience émancipée? - Je répondes: "En le transformant". ... La Recherche. (AH219-220. ... le dernier acte se prépare, visiblement. Sous quelque forme imprévisible, la Terre s'éveillera demain "pan-organisée". (AH223) Sous nos yeux, disais-je, l'Humanité tisse son cerveau. Demain, ... du point de vue scientifique, la véritable difficulté posée par l'Homme n'est pas de savoir s'il est le siège d'un Progrès continué : mais c'est bien plutôt de concevoir comment ce Progrès va pouvoir se poursuivre longtemps au train dont il va sans que la Vie n'éclate sur elle-même ou ne fasse éclater la Terre sur laquelle elle est née. (AH97) La double crise, déjà sérieusement amorcée, au Néolithique, et qui approche de son maximum sur la Terre moderne, elle tient d'abord, nous l'avons dit, à une Prise en masse (à une "planétisation", pourrait-on dire) de l'Humanité: Peuples et civilisations parvenus à un tel degré, soit de contact périphérique, soit d'interdépendance économique, soit de communion psychique, qu'ils ne peuvent plus croître qu'en s'interpénétrant. Mais elle tient aussi à ce fait que, sous l'influence combinée de la Machine et d'un surchauffemnt de Pensée, nous assistons à un formidable jaillissement de puissances inoccupées. L'Homme moderne ne sait plus que faire du temps et des puissances qu'il a déchaînées entre ses mains. Nous gémissons de cet excès de richesses. Nous crions au "chômage". Et pour un peu nous essaierions de refouler cette surabondance dans la Matière dont elle est sortie, - sans remarquer ce que ce gestion contre nature aurait d'impossible et de monstrueux. Compression grandissante des éléments au sein d'une énergie libre qui croît aussi sans arrêt. Comment ne pas voir dans ce double phénomène les deux symptômes liés, toujours les mêmes, d'une saute dans le "Radial", c'est un à dire d'un pas nouveau dans la genèse de l'Esprit! (PH 281) Au delà du collectif, l'hyper-personnel (PH 282). le même traitement "planétisant" appliqué, non plus cette fois à un substratum passif mais à une masse humaine animée de l' "esprit d'Evolution" ? - Alors, au coeur du système, un flot de forces sympathiques de répand, qui modifie du tout au tout l'allure du phénomène: sympathie d'abord... Plus d'asservissement ni d'atrophie à craindre dans un milieu ainsi chargé de dilection ! (AH170-171) Une à une autour de nous, comme un continuel effluve, "les âmes" se dégagent, emportant vers le haut leur charge incommunicable de conscience. - Une à une : et cependant point isolément. Car pour chacune d'entre elles, il ne saurait y avoir, de par la nature même d'Oméga, qu'un seul point possible d'émersion définitive: celui où, sous l'action synthétique de l'action qui personnalisé, enroulant sur eux-mêmes ses éléments en même temps qu'elle s'enroue sur elle-même, la Noosphère atteindra collectivement son point de convergence, - à la "Fin du Monde". (PH 303) La terre finale (PH 304) La fin de la vie planétaire: maturation et évasion (AH153) ... Jeans calcule que la terre en a encore pour des millions d'années... laisser nos coeurs se gonfler, en ce frais matin, aux espérances presque indéfinies de la glorieuse journée qui commence. Mais, quelques pages plus loin, ne nous décrit-il pas cette même humanité tristement vieillissante, désabusée, sur un astre refroidi, face à un anéantissement inévitable? ... D'autres cherchent à nous rassurer par l'idée d'une évasion à travers l'espace... cette solution ne fait que reculer le problème. ... il s'agit d'exorciser radicalement de notre horizon le spectre de la Mort. ... l'idée... qu'il existe en avant, ou plutôt au coeur, de l'univers prolongé suivant son axe de complexité, un centre divin de convergence le point Oméga.... Imaginons maintenant que la sensibilité ou perméabilité mystique de la couche humaine augmentant avec la planétisation, la perception d'Oméga vienne à se généraliser, de façon à échauffer psychiquement la Terre en même temps que physiquement celle-ci se refroidit. Alors ne devient-il pas concevable que l'humanité atteigne, au terme de son resserrement et de sa totalisation sur elle-même, un point critique de maturation, au bout duquel, laissant derrière elle la Terre et les étoiles retourner lentement à la massé évanouissante de l'énergie primordiale, elle se détacherait psychiquement de la planète pour rejoindre, seule essence irréversible des choses, le point Oméga? Phénomène semblable extérieurement à une mort, peut-être : mais, en réalité, simple métamorphose et accès à la synthèse suprême. ... N'ayez donc pas peur! Que la construction de super-organismes... soit une opération dangereuse... Non sans raison toute forme d'existence communiste nous effraie parce qu'elle semble entraîner automatiquement avec soi perte ou mutilation de notre personnalité. Mais cette anxiété devant une mécanisation en apparence fatale de nos activités ne tient-elle pas au fait que nous oublions d'introduire dans nos calculs le facteur le plus important? ... (AH170) par approfondissement logique et biologique du mouvement qui la resserre, ne trouvera-t-elle pas son coeur ... ? (AH225) Rassurons-nous donc. L'énorme système industriel et social qui nous enveloppe ne tend pas à nous écraser, il ne cherche pas à nous enlever notre âme... Ce n'est... qu'en nous plongeant au coeur de la Noosphère que nous pouvons espérer, que nous pouvons être sûrs, de trouver, tous ensemble aussi bien que chacun, la plénitude de notre Humanité. (AH231). Oméga, le grand attracteur ... du régime de socialisation compressive où nous venons d'entrer, rien ne permet de prévoir le relâchement, et encore moins la fin. Dans ces conditions, il ne nous servirait évidemment à rien de chercher à nous évader du tourbillon qui sur nous se resserre. Par contre, ce qui importe extrêmement, c'est de savoir comment, dans ce tourbillon, nous orienter et nous comporter spirituellement de telle sorte que l'étreinte totalisante à laquelle nous sommes soumis ait pour conséquence, non point de nous déshumaniser par mécanisation, mais (comme il semble possible) de nous sur- humaniser par intensification de nos puissances de comprendre et d'aimer. (AH360) Pendant longtemps, sous la pression des forces externes occupées à le concentrer, on pourrait dire que l'Humain s'est développé d'une façon surtout automatique, - principalement talonné, suivant l'expression de Bergson, par une vis a tergo. Mais à partir du moment où l'esprit, initialement apparu (ainsi qu'on l'a fort bien dit) "comme un simple moyen de survivre", s'est peu à peu trouvé élevé à la fonction et à la dignité de "raison de vivre", il était inévitable que, avec l'accentuation des forces de liberté, une modification profonde se dessine dans le régime de l'anthropogénèse, - modification dont nous commençons seulement à sentir tous les effets. Jusque dans les zones les plus spiritualisées de notre être, sans doute, certaines nécessités intérieures subsistent qui nous forcent inexorablement à poursuivre sans arrêt notre marche en avant. ... Reste qu'à ce déterminisme de fond s'ajoute et s'allie incontestablement, à mesure que grandit la Réflexion, une possibilité pour l'Homme de se dérober ou de se refuser à ce qui ne paraîtrait satisfaisant ni à son coeur, ni à sa raison. Ce qui revient à dire qu'à partir d'un degré suffisant d'hominisation, la "chaîne planétaire" génératrice de l'Humain ne saurait plus continuer à fonctionner que dans une certaine atmosphère de consentement, c'est à dire finalement sous l'action de quelque désir. Doublant, et peu à peu relayant, la poussée venant d'en vas, voici donc que l'apparition d'un attrait descendant d'en haut se découvre comme organiquement indispensable pour la suite de l'opération: indispensable pour soutenir l'élan évolutif; et indispensable, en même temps, pour créer, autour de l'Humanité en cours de totalisation, la chaleur psychique, l'atmosphère cordiale, hors de laquelle l'emprise économico-technique du monde ne saurait qu'écraser les âmes les unes contre les autres, sans parvenir à les souder entre elles et à les unifier - Le pull après le push, comme diraient les Anglais. (AH361) Or de quel foyer imaginer que puisse rayonner, sur nos intelligences et sur nos coeurs, cette mystérieuse et indispensable attraction? D'une manière tout à fait générale, on peut dire que, par structure et par construction, l'Humain, devenu conscient de son état d'inachèvement, ne peut se prêter sans révolte, ni surtout se donner avec passion, au mouvement qui l'entraîne, que si au terme de celui-ci se dessine (au moins à titre de "limite") quelque consommation de type à la fois définitif et défini. Surtout pas la dispersion dissolvante, ni le rouet! A être respirable... il ne pourrait y avoir... qu'un Univers ...convergent. Quelque cime, quelque révélation, quelque transformation vivificatrice au bout de la trajectoire... (AH362) ... deux solutions partiellement divergentes se présentent et s'opposent... Suivant les uns ("solution collectiviste"), il suffirait, pour assurer le succès biologique de notre évolution, que l'Humain réussisse peu à s'arranger globalement en une sorte de circuit fermé, suivant lequel chaque élément pensant... connecté avec tous les autres parvienne à une certaine clarté finale de vision et à une certaine chaleur extrême de sympathie... mais ceci sans apparition... d'aucun Centre... Suivant les autres, par contre ("solution personnaliste"), c'est justement quelque Centre de rassemblement, c'est précisément quelque clef de voûte qu'il faut prévoir et postuler... Si en effet... une forme réelle d'amour ne surgit pas au coeur de l'évolution - amour plus fort que tout égoïsme privé et toute passion particulière - comment voulez-vous que jamais la Noosphère se stabilise? Et si un noyau ultra-consistant ne surgit pas au sein de la mouvance cosmique, assurant, par sa présence, la conservation définitive de tout l'incommunicable Réfléchi... En vérité, pour cohérer, sans la broyer, la multitude humaine (même prise dans son état actuel de sur-compression)... un champ d'attraction à la fois puissant et irréversible paraît indispensable... Ainsi raisonnent et sentent (au moins implicitement) depuis deux mille ans tous les chrétiens. Et ainsi, j'en suis convaincu, se trouvera obligé de penser, sous l'urgence des événements, un nombre toujours croissant de biologistes et de psychologues. Si bien que le plus grand événement aujourd'hui en cours dans l'histoire de la Terre serait peut-être bien, tout justement, la découverte graduelle... non pas seulement de Quelque Chose, mais de Quelqu'un, au sommet engendré par la convergence sur lui-même de l'Univers en évolution. (AH363). )