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INTERNET/INTRANET

Réseau unifié pour l'hypermonde ? Pierre BERGER, 13 février 1996 Document interne de réflexion et d'animation du débat. Ne pas communiquer Peut-on encore douter Je suis frappé par l'efficacité du Web, si l'on dispose d'outils puissants. Mon entreprise vient de m'installer - un Pentium 75, 16 méga-octets, Windows 95, - accès à Internet par serveur interne avec ligne spécialisée à 64 kilobits/seconde. Non content de déferler sur les relations privées aussi bien que professionnelles, Internet commence a pénétrer les réseaux internes des entreprises. Et menace de balayer les architectures et les progiciels patiemment élaborées au cours des ans. Les DSI verront-ils d'un bon oeil cette évolution vers l'"intranet"? Il se recommande par sa simplicité (au moins a priori), le caractère bon marché sinon "freeware" de ses produits et le support appporté par un nombre croissant d'industriels sans parler des environnements universitaire. Il a de quoi les inquiéter aussi. D'une part en introduisant dans l'entreprise les émanations sulfureuses d'un monde incontrôlé et soupçonné des pires méfaits. D'autre part en remettant en cause les efforts d'intégration engagés depuis plusieurs années pour mettre au pas l'informatique "sauvage" des ordinateurs personnels. Unification des "couches basses" Le mouvement a commencé à relativement bas niveau, avec le succès deTCP/IP (Transmission control protocol/Internet protocol), qui a fortement contribué au déclin du modèle OSI. Et qui sert aussi de base au modèle Corba (Common object request broker architecture), un des pôles de développement des technologies objet. On remonte maintenant vers les applications. La messagerie, bien sûr, vocation d'origine d'Internet. Or cette messagerie peut de plus en plus servir un peu à tout, grâce aux "pièces jointes". Autrement dit, elle menace les outils même de la GED (Gestion électronique de documents). L'utilisation d'Internet en mode Web met déjà à la disposition du grand public une intégration multimédia rarement atteinte sur les applications professionnelles classiques. Allant plus loin, le mode message inspire les outils d'asynchronisme qui pénètrent aujourd'hui le mode transactionnel (MQ Series d'IBM, intégré à Som-DSom). Pourquoi, dès lors, ne pas utiliser les fonctionnalités Internet pour les applications transactionnelles les plus classiques. A la limite, Internet sait aujourd'hui travailler en temps réel. On peut en effet l'utiliser pour une application simple mais très exigeante en la matière, la téléphonie. Les outils nécessaires commencent à fleurir sur le marché. Parmi les derniers annoncés, citons la gamme Chameleon Enterprise (NetManage), avec ses modules clients et serveurs, et même son outil de migration à partir de SNA. Des réalisations en entreprise En France comme aux Etats-Unis, quelques entreprises ou d'organismes publics ont déjà fait le saut. Citons dans l'hexagone le CNFPT (Centre national de formation des personnels territoriaux) ou le Cena (Centre d'études de la navigation aérienne). Aux Etats-Unis, on compte parmi les utilisateurs d'Intranet des firmes diverses et connues comme Levi Strauss, General Motors, Merril Lynch ou l'université de Californie, sans compter AT&T soi-même. Cela ne fait pas l'affaire, note le Wall Street Journal (du 7 novembre dernier)... d'IBM qui vient d'acquérir le standard du marché en matière de groupware, Notes. Notre confrère CIO du 1er novembre analyse le cas de Sterling Software, utilisateur enthousiaste. Les jeux ne sont pas faits, et Notes peut contre-attaquer, ou s'appuyer sur les outils de type Internet pour jouer la complémentarité. La firme fut conduite dans cette voie du fait même de ses relations d'affaires avec le ministère de la Défense (DOD), promoteur initial d'Internet. L'imprégnation s'est faite peu à peu. Puis la firme a réuni une équipe d'intégrateurs, identifié les besoins en matériels et logiciels, puis lancé le déploiement à partir d'un premier site. Sterling estime devoir à son Intranet un gain substantiel de productivité, et chiffre ses économies à 40 millions de F par an. Et considère son réseau comme très fiable. Grâce à des coupe-feux (firewalls) soignés mais aussi à une discipline rigoureuse, peut-être plus facile à mettre en oeuvre aux Etats-Unis qu'en France, d'ailleurs. Les jeux sont-ils faits? Au delà des arguments économiques et techniques, le succès des Intranets dépendra de facteurs culturels. Depuis quelques décennies, les solutions qui paraissent peu sérieuses aux informaticiens professionnels réussissent en général à s'imposer. La vague Internet, relayée par l'Intranet, balayera-t-elle, pour le meilleur et pour le pire, les architectures et les schémas directeurs qui ne sauront pas la canaliser? Il ne faudra sans doute que quelques mois pour le savoir. Network computers et Applettes Où mettre l'intelligence? Deux logiques sont en train de s'affronter, le réseau lui-même, après tout n'en ayant cure. Une certaine logique d'Internet conduit à évacuer au maximum toute la valeur ajoutée du réseau vers les points d'accès, PC, stations et serveurs. Les noeuds de réseau ne sont que de simples aiguillages. Mais comment se répartit la puissance entre clients et serveurs ? - Une optique PC conduit a augmenter progressivement la puissance du poste de travail. Au point que la même machine pourrait aussi bien faire le travail que l'on confiait hier à de gros mainframes par lots. Ce serait assez l'orientation actuelle de Microsoft. - Une optique "Network Computer" conduit à dégonfler le PC pour ramener au maximum les puissances et les fonctionalités vers des serveurs. Les applications elles-mêmes se décomposent en une grosse partie serveur et de petits morceaux chargés dynamiquement sur les postes Internet, les applettes. - Attention: il n'y a pas que les hommes dans le réseau. Il y a aussi des éléments non humains: . automates. ils peuvent déclencher des évenements "aléatoires", en serait que des tops d'horloge . des capteurs sur le monde extérieur . agents intelligents et virus . des pannes. On tend à présenter le modèle comme un humain employant un ressource, ou communiquant avec d'autres humains. Mais en fait, on cause surtout avec des machines, et les machines parlent beaucoup entre elles. Tout cela sur le mode message. La fin des "architectes" L'Intranet est bien différent des réseaux classiques. Il n'y a plus la hiérachisation, les structures en étoile. On est systèmatiquement "peer to peer" Le mode général est le mode message. Il n'y a plus lieu, à proprement parler, de construire des "architectures de réseau". Il suffit de faire grossir les tuyaux quand les volumes deviennent trop lourds entre deux points. Pour le reste, les utilisateurs se chargent non seulement des adressages, mais des assemblages transactionnels (optique "urbanisme" de Jacques Sassoon) Pour l'instant, ce type de réseau s'applique peu au mode "broadcast", domaine des satellites et de la télévision. Il ne faut pas en sous-estimer l'importance, complémentaires des modes "capillaires" et "symétriques" habituels à Internet. Du chômage à prévoir chez les spécialistes de réseaux?